Bases neurophysiologiques de la souplesse : comprendre, respecter, progresser

fourier34 Par Le 20/10/2025 à 17:55

Dans Sport

 INTRODUCTION

La souplesse est souvent perçue comme une qualité physique secondaire, réservée aux danseurs, gymnastes ou yogis. Pourtant, elle constitue un élément fondamental de la santé musculo-articulaire, de la performance sportive et du bien-être général. Derrière chaque mouvement fluide se cache une orchestration complexe entre les muscles, les articulations et le système nerveux. Comprendre les bases neurophysiologiques de la souplesse, c’est apprendre à s’assouplir intelligemment, sans douleur ni blessure.

1. LES FONDEMENTS NEUROPHYSIOLOGIQUES DE LA SOUPLESSE

1.1 Le rôle du système nerveux dans l’étirement

La souplesse ne dépend pas uniquement de la longueur des fibres musculaires. Elle repose sur la capacité du système nerveux à tolérer une mise en tension. Deux capteurs sensoriels jouent un rôle clé :

  • Les fuseaux neuromusculaires : situés dans les muscles, ils détectent la vitesse d’étirement. Si le muscle est étiré trop rapidement, ils déclenchent un réflexe myotatique — une contraction réflexe pour protéger le muscle.
  • Les organes tendineux de Golgi : situés dans les tendons, ils détectent la tension excessive. Lorsqu’ils sont suffisamment stimulés, ils induisent une inhibition autogène, favorisant le relâchement musculaire.

Ces mécanismes sont essentiels pour éviter les blessures, mais ils peuvent aussi freiner l’assouplissement si les étirements sont mal réalisés.

1.2 La phase d’accommodation : clé de la progression

Lorsque vous maintenez un étirement de manière douce et prolongée, le système nerveux entre dans une phase d’accommodation. Environ 20 secondes sont nécessaires pour que les capteurs sensoriels s’habituent à la tension et permettent un relâchement progressif du muscle.

C’est à ce moment que vous pouvez augmenter légèrement la mise en tension, sans provoquer de contraction réflexe. Cette phase est cruciale pour gagner en amplitude articulaire sans risque.

 

sénior qui s'étire

2. Les erreurs fréquentes à éviter

2.1 Les à-coups et étirements brusques

Les étirements saccadés ou réalisés avec force déclenchent le réflexe myotatique, qui contracte le muscle au lieu de le relâcher. Cela va à l’encontre de l’assouplissement et peut provoquer des douleurs ou des microtraumatismes.

À éviter absolument : les rebonds, les mouvements rapides ou les tensions forcées.

2.2 Étirements à froid : pas forcément dangereux

Contrairement à l’idée reçue, les étirements à froid ne sont pas intrinsèquement risqués s’ils sont bien réalisés :

  • Ils peuvent être plus efficaces pour améliorer la souplesse : à froid, le muscle est moins “élastique” mais plus stable, ce qui permet un travail plus profond sur l’amplitude articulaire.
  • Ils sont recommandés pour des séances dédiées (hors entraînement), comme le stretching ou le yoga, où l’objectif est l’assouplissement et non la performance immédiate.
  • Ils doivent être progressifs, doux, et sans douleur : pas de mouvements balistiques ni de mise en tension brutale.

2.3 Étirements prolongés avant l’effort

Contrairement à une idée reçue, les étirements statiques prolongés avant une activité physique peuvent nuire à la performance. Ils réduisent le tonus musculaire, altèrent la réactivité neuromusculaire et diminuent l’explosivité.

Alternative recommandée : des mobilisations dynamiques ou des assouplissements courts, réalisés après un échauffement.

2.4 Étirements à chaud : utiles, mais pas toujours nécessaires

L’échauffement augmente la température musculaire et la viscosité des tissus, ce qui facilite les étirements dynamiques ou actifs.

  • Mais étirer juste après un effort intense (course en côte, pliométrie…) peut aggraver les micro-lésions musculaires et retarder la récupération.
  • Il est souvent préférable de s’étirer à distance de l’effort, que ce soit à chaud ou à froid, selon l’objectif (récupération, souplesse, détente).
Ce qu'il faut retenir 
Objectif  Moment idéal pour s'étirer Type d'étirement recommandé
Améliorer la souplesse À froid, hors séance  Étirements passif ou FNP doux
Préparer un mouvement Après échauffement  Étirements dynamiques ou actifs 
Récupération post-effort  À distance de la séance  Étirements doux, sans douleur 

 

 

3. LES BONNES PRATIQUES POUR DÉVELOPPER SA SOUPLESSE

3.1 Étirements passifs progressifs

Les étirements passifs consistent à maintenir une position sans contraction volontaire, en laissant la gravité ou un appui externe agir. Pour qu’ils soient efficaces :

  • Installez-vous confortablement
  • Maintenez la position au moins 20 à 30 secondes
  • Respirez lentement et profondément
  • Relâchez progressivement

Objectif : atteindre la phase d’accommodation sans déclencher de réflexe défensif.

3.2 Étirements actifs et proprioceptifs

  • Les étirements actifs sollicitent le muscle antagoniste pour favoriser le relâchement du muscle cible. Ils améliorent le contrôle moteur et la stabilité articulaire.

Exemple : pour étirer les ischio-jambiers, contractez les quadriceps en levant la jambe tendue.

  • Les techniques proprioceptives (PNF, contracté-relâché) utilisent des contractions volontaires suivies d’un relâchement pour optimiser la plasticité neuromusculaire.

3.3 Intégration post-effort

La meilleure fenêtre pour étirer en profondeur se situe après l’activité physique, lorsque les muscles sont chauds et les tissus réceptifs.

Avantages :

  • Favorise la récupération
  • Réduit les tensions résiduelles
  • Améliore la souplesse durablement

Conseil : intégrez une routine d’étirements post-entraînement, ciblée et progressive.

4. ADAPTER LES ÉTIREMENTS À CHAQUE PROFIL

4.1 Sportifs

Les sportifs ont besoin d’une mobilité fonctionnelle, adaptée à leur discipline. Les étirements doivent être ciblés, intégrés dans les phases d’échauffement et de récupération, et respectueux des contraintes biomécaniques du geste sportif.

Exemples :

  • Étirements dynamiques avant un sprint
  • Étirements passifs après une séance de musculation

4.2 Sédentaires

La sédentarité favorise les raideurs posturales, les déséquilibres musculaires et les douleurs chroniques. Les étirements permettent de réactiver les chaînes musculaires, de corriger les compensations et de retrouver une mobilité confortable.

Zones clés à travailler :

  • Hanches
  • Épaules
  • Colonne vertébrale

4.3 Séniors

Chez les personnes âgées, les étirements contribuent à maintenir l’amplitude articulaire, à prévenir les chutes et à améliorer l’équilibre. Ils doivent être doux, sécurisés et accompagnés d’un travail de proprioception.

Activités recommandées : stretching doux, yoga adapté, mobilisation articulaire.

sportif qui s'étire l'épaule

5. L’ACCOMPAGNEMENT OSTÉOPATHIQUE

5.1 Identifier les déséquilibres musculaires

L’ostéopathe peut repérer les asymétries posturales, les groupes musculaires trop sollicités ou inhibés, et les compensations qui perturbent la souplesse. Un bilan ostéopathique permet de personnaliser les étirements et d’éviter les erreurs.

5.2 Conseils personnalisés

L’ostéopathe peut vous guider dans :

  • Le choix des techniques d’étirement adaptées à votre morphologie
  • L’intégration des étirements dans votre routine sportive ou professionnelle
  • La prévention des douleurs liées à un déséquilibre musculaire

Pour toute activité physique, recherche de bien-être ou douleur persistante, n’hésitez pas à demander conseil à votre ostéopathe.

CONCLUSION

La souplesse est bien plus qu’une capacité physique : c’est le reflet d’un dialogue harmonieux entre le muscle et le système nerveux. En respectant les bases neurophysiologiques, vous pouvez progresser en toute sécurité, améliorer votre confort articulaire et prévenir de nombreuses pathologies.

Évitez les à-coups, échauffez-vous correctement, soyez patient, et surtout… écoutez votre corps. Et si vous avez un doute, votre ostéopathe est là pour vous accompagner.